Ego, narcissisme, estime de soi, amour propre : quelles différences ?

Un email m’a posé une question intéressante sur les différences entre ces différents concepts. Car oui, il existe des différences même si parfois elles sont ténues.
Ainsi l’égo est difficile à cerner car ce terme en tant que tel n’existe pas à la base dans les concepts en psychanalyse ni en psychologie, il y arrive tardivement. C’est trop vague. La notion d’égo fait surtout référence à la spiritualité ou à la philosophie. Il s’agirait de la conscience que l’on a de nous même. Ce n’est pas soi, car la conscience n’est qu’une petite partie de nous. Car oui, vous avez bien lu on parle de conscience, l’égo exclu l’inconscient et les censures et tout ce qui se passe à la frontière entre l’inconscient et le conscient.
L’égo c’est ce qui se passe en vous dont vous êtes conscient (« vos pensées ») et c’est aussi ce que vous avez conscience d’être (« ce que je pense être ») psychiquement s’entend. Cette vision est fortement censurée et peut être déformée car l »égo est une entité psychique construite à partir de représentations mentales et de dysfonctionnements divers.
Attention l’égo n’est pas le « je », l’égo est plus proche de la notion de « soi » (« self »). Ce qui ne vous aide pas.
La notion d’égo subit donc énormément d’influences à la fois du monde interne et du monde externe. La perception du monde externe étant elle-même déformée à la lumière de notre égo.
L’égo c’est ce que vous croyez voir lorsque vous vous regardez dans votre miroir intérieur. Et l’influence du monde extérieur, fait qu’il est sans cesse en confrontation mais aussi en comparaison avec les autres. L’égo fluctue donc sans cesse en fonction de ce que vous « recevez » et des « forces » (narcissisme et estime de soi) qui sont en vous.
Le narcissisme est un terme freudien dans toute sa splendeur. C’est l’amour de soi.
Comme Narcisse qui se mirant dans l’eau et tombe amoureux de son reflet, le narcissique s’aime lui. Freud en fait le point d’orgue sur ses théories sur l’homosexualité.
Le narcissisme est présent dès le début de la vie, car il est le centre du monde.  Pour le bébé rien n’existe à part lui, le monde faisant partie de lui. A l’extrême, l’individu se coupe du monde ce qui créé des troubles tels que la schizophrénie.
Le narcissique ne peut se tourner vers les autres, il n’est pas passé de la mère à un autre objet d’amour, cet amour est revenu vers lui. Les autres n’existent pas, ils ne comptent. Ils ne s’y confrontent pas et n’y s’y comparent pas. Il est à la fois au-dessus et au-delà.
Le narcissisme ce n’est donc pas soi, mais l’amour qu’on a pour soi. Une faille narcissique nécessite qu’elle soit comblée… par soi ! La défaillance narcissique va donc mettre en place un système de fonctionnement hypernarcissique vu de l’extérieur, car l’individu n’a de cesse de combler la faille, quitte à « vampiriser » ceux qui l’entourent, il lui faut être ce qu’il voudrait être (« idéal du moi »).
L’estime de soi est devenue est concept floue pour le grand public. Utilisé partout pour désigner n’importe quoi, l’estime de soi est ce qu’il faut avoir ou ce qu’il faut restaurer à tout prix.
L’estime de soi est la conscience de valeurs personnelles que l’on se reconnaît.
Ces valeurs sont acquises au cours de la vie et sont fluctuantes.
Elles permettent d’être adaptables et adaptés au monde extérieur. Elles permettent de prendre des risques et d’y faire face.
La notion d’estime de soi peut être rattachée au concept « d’attachement » et « d’intelligence ». Ce qui veut dire que pour se reconnaître des valeurs, il faut initialement que d’autres vous aient reconnus comme ayant une valeur. L’estime de soi démarre donc par l’estime que d’autres ont eu de vous.
De nouveaux courants tendent à montrer qu’avoir une trop grande estime serait une position dangereuse qui nous mettrait sur un piédestal avec le risque toujours présent d’en tomber. L’estime de soi ne serait en aucun cas nécessaire, mais il faudrait juste se savoir se satisfaire de ce que l’on est et donc ne plus entrer en comparaison.

Ajoutons donc l’amour propre.
C’est étrange cette expression non ? Comme s’il pouvait y avoir de l’amour sale… D’ailleurs l’amour est-elle « propre » ? C’est une expression qui renvoit à quelque chose de pur.
L’amour propre est définie comme un sentiment.
Pas de concept abstrait ici. L’amour propre va se rapprocher de l’égo en ce que réussir à s’aimer n’est possible qu’au travers le regard aimant de l’autre.
C’est quelque chose d’aliénant. Il y a une dépendance à l’autre.
Les différents courants et études psy, tendent à montrer qu’on ne fait rien pour rien. Nous agissons toujours dans le but d’avoir un retour valorisant. Mais du coup, l’autre détruit un pouvoir énorme sur nous, car d’un regard il peut nous construire ou nous détruire.
L’amour propre, s’il se base sur l’égo, va s’en éloigner car son existence est corrélé à l’échec du narcissisme. ‘je ne m’aime pas, je n’existe que dans le regard de l’autre’. Un narcissisme qui passerait son temps à vouloir être compensé, comblé via l’autre.
Ici, si l’autre se refuse à la valorisation, l’estime de soi n’existe plus, l’autre détient le pouvoir extrême de nous faire vivre ou de nous tuer. C’est souvent l’amour propre qui pousse au passage à l’acte, car l’autre ne remplissant pas son rôle, il faut le détruire afin de restaurer son amour propre.

C’est une notion peu étudiée, car comme tous les sentiments ou les émotions, cela reste un concept difficile à cerner et à valider.

 

14 réflexions sur “Ego, narcissisme, estime de soi, amour propre : quelles différences ?

  1. Merci beaucoup de la réponse, je m'aperçois que la question n'était pas complète, j'ai oublié l'amour propre dans la foulée..(est ce que ça s'oublie l'amour propre d'ailleurs?)Millerole

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  2. salut,article très intéressant !!celui qui parle tout le temps en commençant ses phrases par "moi, je", est-ce le narcissique ?aussi, dans un autre article sur les pervers, tu disais que parler de "pervers narcissique" était un pléonasme. En quoi un pervers est-il narcissique ? est-ce que ça rejoint la vampirisation de son entourage pour combler sa faille ? vampiriser comme détruire la valeur chez l'autre qu'il ne possède pas pour rester supérieur ?

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  3. Ah le célèbre "moi je" de notre président ! Dans "moi, je" ce qui est intéressant, c'est que la personne parle deux fois d'elle. "je" ne suffit pas. Il faut ajouter moi, comme si dans "je" l'opinion personnelle n'était pas impliquée ou qu'on pense que l'autre n'entend pas le "je", c'est à dire le "moi". Dire "moi je" ramène bien sur au narcissisme puisqu'on parle de soi. Mais en fait c'est plutôt soit l'égo qui s'exprime ("moi, moi, moi") soit l'estime de soi (je ne crois pas en moi, donc je vous le fais en double) soit à l'amour propre (écoutez moi sinon je n'existe pas). Tout va dépendre de ce que la personne qui s'exprime met dessous : soit le besoin de se mettre en avant, soit le besoin d'attirer le regard de l'autre. Ensuite oui un pervers souffre obligatoirement d'un trouble du narcissisme, c'est bien pour cela qu'il est pervers d'ailleurs. Il a besoin des autres, pour les dominer et les manipuler, pour se sentir supérieur et nourrir son estime de soi. Non, il ne vampirise pas pour détruire, la destruction est une conséquence, mais il vampirise pour nourrir la faille qu'il a en lui. Il va chercher chez l'autre la force qu'il n'a pas en lui, c'est une vision animiste.

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  4. je suppose que le pervers n'a aucune culpabilité à voir la destruction qu'il engendre… c'est plutôt une jouissance pour lui de voir l'effondrement de l'autre !?ah les mots ! tout ce qu'ils peuvent dévoiler à notre insu !!

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  5. Pourquoi culpabiliserait-il puisqu'il projette sa vision sur l'autre et qu'il pense que c'est l'autre l'agresseur ?Il n'y pas spécialement de jouissance en ces termes, j'utiliserais plutôt le terme de "gain" (ce qui ramène à un bénéfice).Le pervers n'est pas nécessairement sadique comme le sadique n'est pas nécessairement pervers !

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  6. Quel jugement négatif tu poses sur toi même ! Il n’y a pas de question bête.
    Alors il y a des personnes qui ont toutes la raisons d’avoir un fort égo, beaucoup de savoir, beaucoup de culture. Contre toute attente les personnes les plus cultivées sont souvent les plus accessibles et les plus humbles, car plus tu sais moins tu sais. Celles qui ont un « bagage » avec un fort égo sont celles qui pensent que l’autre peut en savoir plus ou qui pensent que leur statut est basé sur une imposture ou qui pensent sue l’Autre va se rendre compte qu’en fait ce n’est qu’un savoir de surface.
    Alors oui, un égo exprimé comme fort est souvent une marque du manque d’estime de soi. C’est basé tout simplement sur le fait que les parents, la familles, les proches quoi, n’ont cessé de remettre en cause le savoir de l’enfant puis de l’ados. Du genre « tais toi tu ne sais rien », ça n’aide pas à croire en soi. Il y a la double contrepartie qui va avec, c’est la peur que l’Autre découvre qu’on est faible et la peur que l’Autre découvre qu’en fait on est bête. En fait il n’y a ni faiblesse ni manque de savoir, il a la perception de soi faussée qui laisse penser su’on est faible et sans savoir, ce n’est pas la réalité.

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  7. J’ai reçu au boulot pour la 3ème fois ce jour un jeune homme qui me semble avoir un gros soucis de narcissisme.

    Je suis censée l’aider à travailler son projet professionnel. Seulement il ne semble focalisé que par le fait de montrer sa supériorité, sa pureté, son altruisme, etc. Bref dès qu’il pense repérer un trait de caractère que je serais censée trouver valorisant, il déclare le posséder. Il a été jusqu’à biaisais la réalisation d’exercices (ou quand t’es pas honnête ça se voit) et a fait n’importe quoi par excès de zèle. Tout ça l’amène à se contredire sans arrêt. Quand je pointe ses contradictions, il panique et fait appel à un tiers fautif.

    De la même façon, il semble ne jamais se remettre en question, tout est toujours de la faute des autres. Il a perdu son permis, mais il ne dit pas « j’ai perdu mon permis » mais « on m’a pris mon permis », comme un gosse qui trouverait une punition injuste. Il n’a pas échoué à son examen, on ne lui a que partiellement donné. Par contre, tant que ce sont des généralités, il est très ceci, très cela. Il cherche à donner une image très sûr de lui (il a fait la même chose lors de son inscription à une autre collègue).

    Dans son attitude physique aussi, il s’affale à moitié sur mon bureau, et s’approche de plus en plus. Il envahit mon espace de travail. Je me suis ostensiblement reculée, mais il n’a pas compris. Il monopolise la parole. Juge le comportement des autres, se ravise quand il voit que je tique. Bref il essaye de me jeter de la poudre aux yeux, et ne semble pas m’écouter quand je lui dis qu’il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse, que ce n’est pas à moi de juger de ses choix, de ses priorités, mais juste à lui de savoir dans quoi il se sent bien, quelles activités il aime pratiquer et quelles sont ses valeurs, pour trouver un truc qui lui plaise et dans lequel il puisse rester quelques temps, voire s’épanouir.

    Il projette très maladroitement une image de mec confiant bien sous tout rapport, mais ne creuse pas en lui pour exprimer ce qu’il aime vraiment.
    Je ne vois pas comment, si les choses ne bougent pas, l’aider à construire son projet.

    Est-ce que lui dire très clairement qu’il arrête d’essayer de m’impressionner pour se concentrer sur lui est une bonne option ? Ou est-ce qu’aborder les choses frontalement risque de faire des dégâts dans sa tête ? Je le sens « sur la brèche ».

    Il m’insupporte (me rappelle mon ex, je retrouve les même attitudes mais moins bien camouflées), mais je n’aimerais pas le blesser d’avantage en le brusquant. Il ne m’a rien fait personnellement et je suis payée pour l’aider. Mais là ça n’avancera pas. Je crois que ce qui bloque son retour à l’emploi dépasse largement le cadre de mon boulot.

    J’ai presque l’impression que si je ne lui dis pas très clairement que s’il fait ceci ou cela je dirai qu’il est un type formidable, il va finir par craquer. Je sens un grand stress chez lui à mesure qu’il cherche une approbation ou une désapprobation de ma part, que je ne lui donne pas. Pas sur ses démarches de recherche (là il y a un cadre, une loi et c’est mon rôle est de lui rappeler s’il n’était pas réglo), mais sur ses priorités, valeurs, etc.

    S’il est possible de dire à quelqu’un qui semble aller mal de peut-être s’adresser à un psy, quand il fait tout pour te démontrer à quel point il va bien et que s’il a des problèmes c’est tout de la faute des autres… Je sèche.

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    1. Toi aussi tu ne joues pas le jeu. Tu ne lui avoues pas que sa situation dépasse tes compétences, tu te laisse débordée. Toi tu ne fixe pas tes limites et lui pense que seules ses limites sont les bonnes. Tu te préoccupes plus de son bien être que du tien.

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  8. Bonsoir,
    L’estime de soi démarre donc par l’estime que d’autres ont eu de vous.

    Mais qui sont ces autres ? mes parents ? je n’ai pas le sentiments qu’ils y sont pour qqch ou au contraire , j’ai tjs voulu leur plaire ! aujourd’hui, Ils ne sont plus là donc je fais quoi ? je ne compte plus sur eux mais sur moi!

    Je manque énormément d’estime de moi ! Je me dévalorise sans cesse .
    Quand on me fait un compliment, je doute de la véracité de celui-ci!
    Même avec ma psy , je doute!
    J’essaye de me persuader qu’elle ne dit pas cela pour que j’avance …

    Je n’ai aucune confiance en moi ni dans les autres .
    Quand j’essaye de donner ma confiance , j’imagine les pires scénarios !
    Ma psy me fait travailler la-dessus … que s’est-il passé ?
    Ma réponse est tjs la même: rien pour le moment!
    Je me sens , je me mets en retrait
    J’ai l’impression de n’être jamais à ma place !
    Même mon odeur me fait peur !
    Je n’ai aucune question! Car il y a-t-il une réponse !

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  9. Bonsoir,
    L’estime de soi démarre donc par l’estime que d’autres ont eu de vous.

    Mais qui sont ces autres ? mes parents ? je n’ai pas le sentiments qu’ils y sont pour qqch ou au contraire , j’ai tjs voulu leur plaire ! aujourd’hui, Ils ne sont plus là donc je fais quoi ? je ne compte plus sur eux mais sur moi!

    Je manque énormément d’estime de moi ! Je me dévalorise sans cesse .
    Quand on me fait un compliment, je doute de la véracité de celui-ci!
    Même avec ma psy , je doute!
    J’essaye de me persuader qu’elle ne dit pas cela pour que j’avance …

    Je n’ai aucune confiance en moi ni dans les autres .
    Quand j’essaye de donner ma confiance , j’imagine les pires scénarios !
    Ma psy me fait travailler la-dessus … que s’est-il passé ?
    Ma réponse est tjs la même: rien pour le moment!
    Je me sens , je me mets en retrait
    J’ai l’impression de n’être jamais à ma place !
    Même mon odeur me fait peur !
    Je n’ai aucune question! Car il y a-t-il une réponse !

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    1. Il s’est passé quelque chose pas spécialement de grave. Mais pour toujours vouloir plaire à ses parents c’est qu’on a l’impression de ne pas exister ou de n’être pas assez aimé et on fait tout pour cela. Ensuite, ca pose la question de pourquoi n’ a t on pas existé dans le regard des parents ?
      D’un autre côté, dans vouloir « plaire » j’entends aussi une désir de séduction. Ce désir de séduction, logique dans la problématique oedipienne, ne pouvait être orienté que vers un des parents et pourquoi vouloir séduire ? Qu’en attend on ? Pourquoi faut il avoir ce type de comportement ? Et comment cela a t il été appris ? Alors comme toujours on parle de « parents », mais ça peut être une autre personne très proche.

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  10. bonjour
    merci pour cet article que je viens de découvrir, ça m’éclaire beaucoup; j’ai été très interpellée par la phrase: on donne le pouvoir à l’autre de nous faire exister ou de nous tuer; là, j’ai senti comme si mes neurones ou autre chose se déconstruisaient et se remettaient en place ou comme quand je sors d’une migraine; vu que je suis là-dedans (donner à l’autre le pouvoir de me faire exister ou de me tuer)
    belle journée à toutes et à tous

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